La célèbre calanque d'En Vau, entre Cassis et Marseille. © - / AFP
Marseille : les calanques ont enfin leur parc
La création aux portes de Marseille du parc national des calanques, dont le décret a été signé le 18 avril 2012, marque l'aboutissement de longues années de débats, parfois houleux, pour trouver un subtil équilibre entre défenseurs de l'environnement et usagers locaux. Le Premier ministre François Fillon, également ministre de l'Écologie depuis le départ du gouvernement de Nathalie Kosciusko-Morizet, a signé le décret et fera une visite des calanques en bateau jeudi à Cassis (Bouches-du-Rhône), dans le cadre de la campagne présidentielle.
Parc "nouvelle génération", il est le premier à voir le jour en France depuis la loi de 2006 augmentant la place des acteurs locaux, et le troisième parc périurbain au monde après Le Cap et Sydney. Son objectif : protéger un site exceptionnel, terrestre et marin, soumis à de multiples menaces (pression urbaine, surfréquentation, pollution, incendies, etc.). L'idée germe déjà dans les années 1910-1920 quand des habitants s'élèvent contre l'extension d'une carrière, raconte Benjamin Durand, directeur adjoint du Groupement d'intérêt public (GIP) porteur du projet.
Régulation
Puis des acteurs associatifs prennent le relais, obtenant le classement du site en 1975. Mais ce n'est que vingt ans plus tard que l'aventure prend véritablement forme par la volonté de quelques amoureux de la nature. "Ils sont venus me voir en me disant : ces calanques, il faut les préserver et trouver un mode unique de gestion de l'espace", se souvient le député UMP Guy Teissier, maire de secteur, qui met en place et prend la tête du GIP en 1999. En avril 2009, un arrêté lance officiellement la concertation, riche de 300 réunions, suivie de l'enquête publique (plus de 4 500 contributions) pour parvenir début 2012 à la charte finale, au prix de moult négociations sur la définition du périmètre notamment.
"Depuis le début, le dossier passionne"... et divise, relève M. Durand. D'un côté, instances environnementales et écologistes déplorent un manque d'ambition du projet ; de l'autre, pêcheurs, plaisanciers, grimpeurs, cabanoniers et élus redoutent une sanctuarisation de l'espace. Au final, "tous les usages qui se pratiquent déjà dans les calanques pourront continuer mais dans un cadre plus régulé", souligne M.Durand. Et M.Teissier salue de "bons équilibres". Ainsi en mer, des zones de non-pêche seront instaurées sur 10,5% du "cœur" du parc, les jet-skis seront proscrits, la visite en bateau se fera sans messages diffusés par haut-parleur pour respecter la quiétude des lieux.
Deux millions de visiteurs par an
Sur terre, la chasse restera autorisée, mais avec un arrêt progressif des lâchers de tir. Les randonneurs seront priés de rester sur les sentiers balisés, les activités de falaise pourront être règlementées, les pratiques sportives extrêmes seront bannies, tout comme le bivouac ou l'éclairage artificiel. Les futurs agents du parc auront pour mission première de sensibiliser le public à la protection de l'environnement, avec possibilité de verbaliser les usagers irrespectueux, et de mieux maîtriser la fréquentation (près de deux millions de personnes par an).
Les militants de la première heure, comme Denyse Ricard-Maubon, fondatrice du collectif "Un parc national pour les calanques", sont moins enthousiastes. "C'est un parc politique, on a tout permis à tout le monde. Il le fallait, mais il n'est pas bon", estime cette habitante dont la famille vit depuis sept générations à Sormiou. Même ambivalence chez les élus écologistes marseillais : si la candidate à la présidentielle Eva Joly viendra fêter jeudi après-midi aux portes des calanques "cette victoire" avec des associations de protection de l'environnement, les élus locaux d'EELV soulèvent plusieurs points d'insatisfaction dans un communiqué.
Ils déplorent notamment "la réduction importante de la zone cœur terrestre et maritime, la faiblesse des propositions des zones de non-prélèvement où toute forme de pêche professionnelle ou de loisirs doit être interdite, et la banalisation de l'activité de chasse en cœur de parc national".
Le Point.fr
Communiqué de presse du 19 avril 2012 de l’ASPAS
Association pour la Protection des Animaux Sauvages
Parc National des Calanques : espace de chasse protégé
Avec la création du Parc National des Calanques, on assiste à la création d’un nouveau genre d’aires protégées : les Parcs Nationaux de protection… de la chasse !
Si l’ASPAS devrait se réjouir de voir aboutir ce projet de protection d’un site exceptionnel aux portes de la seconde ville de France, nous ne pouvons que constater que non seulement ce Parc National n’est pas à la hauteur des attentes en matière de protection de la nature, localement, mais qu’il crée également un grave précédent au sein des aires protégées françaises en y autorisant la chasse, et surtout les pires de ses pratiques.
Dans le Parc National des Calanques seront autorisées tout à la fois, la chasse aux gluaux, un mode de chasse interdit par la législation Européenne, et la pratique des lâchers de gibiers de tirs, véritable honte de la chasse française.
La chasse aux gluaux consiste à enduire des branches de glu, sur lesquelles les oiseaux, attirés par le chant de leurs congénères « appelants », viennent s’engluer. Contraire à ses engagements européens, cette pratique est pourtant autorisée par la France dans les départements de PACA. Elle fait l’objet d’un recours de l’ASPAS auprès de la Commission Européenne en raison de la cruauté de cette chasse particulièrement barbare, mais aussi à cause de sa non sélectivité. En effet, de très nombreuses espèces protégées, mésanges, rouges-gorges, accenteurs, sont victimes par dizaines de milliers de cette pratique scandaleuse. Chaque année, les pouvoirs publics autorisent la capture de plusieurs centaines de milliers de grives par ce procédé.
Cette pratique sera désormais autorisée dans les mêmes conditions au sein d’un Parc National !
Les lâchers de gibiers de tirs, ces faisans ou perdrix sachant à peine voler, lâchés la veille des parties de chasse, pourront être pratiqués en zone centrale du Parc National. Cet espace est pourtant censé protéger la faune sauvage, mais également sensibiliser le public à sa protection.
Dans ce parc, toutes les activités nature seront réglementées et connaîtront des restrictions d’usage, à l’exception de la chasse, qui verra ses pratiques, y comprises illégales, confortées sur l’intégralité du périmètre du Parc. Les promeneurs n’auront pas le droit de cueillir une pâquerette mais les chasseurs pourront tuer la faune sauvage pour se divertir !
L’ASPAS condamne donc avec force, ce bradage de la protection de la nature, cette dégradation inadmissible des Parcs Nationaux, au profit des méthodes de chasse les plus scandaleuses. Ce nouveau cadeau aux chasseurs arrive, comme par hasard, à quelques jours du premier tour des élections présidentielles.
Contact presse : Pierre Athanaze