"Les désastres climatiques accentueront la crise"
Serge Lepeltier est ambassadeur en charge du climat pour la France. Il détaille pour Metro les enjeux du sommet international de Durban.
Qu’est-ce qui va se négocier à Durban ?
Le protocole de Kyoto signé en 1997, engageait les pays développés, hormis les Etats-Unis, à réduire leur gaz à effet de serre. Il se termine fin 2012. Le véritable enjeu, c’est de savoir si on le prolonge. Il faut aussi faire en sorte qu’à terme, on arrive à un accord global avec les pays émergents. Depuis 1997, la carte des émissions mondiales a évolué. A l’époque, la Chine émettait peu par habitant. Aujourd’hui, l’Europe représente 11 % des gaz à effet mondiaux, la Chine et les Etats-Unis 40 %. S’il n’y a plus d’outils contraignants à l’échelle internationale, les premières victimes seront les pays en voie de développement.
Entre la crise économique mondiale et le nucléaire, le climat est-il toujours une priorité ?
L’opinion publique et les Etats voient la lutte contre le réchauffement comme une contrainte, mais c’est aussi une solution. L’engagement pris à Copenhague et à Cancun est de limiter le réchauffement à 2 °C par rapport à l’ère préindustrielle. Le dernier rapport du Giec (Groupe d’experts sur le climat, ndlr) montre que si on continue comme aujourd’hui, on arrivera à 3 °C en 2050, et 5 ou 6 °C en 2100. Les désastres climatiques (cyclones, inondations) perturberont le système d’assurance et accentueront la crise économique. Et les coûts d’adaptation seront tels que le PIB mondial baissera de 5 à 20 %. Economie et climat sont liés.
Durban est-il le sommet de la dernière chance ?
Non. Copenhague a été dramatisé et surmédiatisé, car on voulait obtenir un accord global qui n’a pas été atteint. Aujourd’hui, on a comme principe que chaque conférence doit être un pas supplémentaire, une étape dans le bon sens. Les négociations sur la question du climat sont permanentes.
Des détectives dans les bois
Souches coupées, rapports falsifiés, sols pollués... Les détectives forestiers arpentent les bois en quête de preuves d’une exploitation illégale.
Révéler leur vraie identité mettrait en danger leur mission et même leur vie. Ces Sherlock Holmes forestiers s’attaquent à un business de grande ampleur : l’exploitation illégale du bois. “C’est très dangereux, assure Bustar Maitar, responsable forêt de Greenpeace en Indonésie. Les hommes politiques, la police et l’armée ont des intérêts très puissants dans cette industrie.”
Ses enquêteurs pénètrent dans les forêts en se faisant passer pour des scientifiques ou des chasseurs. « Seuls les Indonésiens peuvent faire ce travail, explique Buster Maiter. Si les entreprises croisent un étranger, elles l’arrêtent. »
Plus étonnant, la chaîne de magasins de meubles Ikea emploie elle aussi des détectives forestiers, 17 au total. « Je me rends sur les sites de production pour m’assurer que le bois que nous utilisons n’a pas été coupé de manière illégale ou irresponsable, détaille Evgeny Zabubenin, détective pour l’enseigne en Russie. Je traque le bois volé, je m’assure que les volumes prélevés ne sont pas excessifs. Je vérifie aussi si les jeunes pousses n’ont pas été endommagées ou si le sol n’est pas pollué. »
Le géant suédois, qui utilise l’équivalent de 325 000 camions de bois par an, n’est pas à l’abri de fournisseurs indélicats. « Nous nous renseignons sur chaque entreprise, chaque scierie, chaque forêt », assure Anders Hildeman, directeur forestier du groupe. Chaque année, 25 millions de dollars de bois illégal sont vendus dans le monde. « Vérifier les certificats une fois par an ne suffit pas, explique Scott Poynton, directeur de l’association TFT. Il faut être là quand le bois est coupé. »
En Indonésie, quand Bustar Maitar repère des pratiques illégales, il n’appelle pas la police, souvent en cheville avec les entreprises forestières. Il filme ou prend des photos. “Nous devons montrer au monde les crimes que subit la forêt.”
"Des satellites pour contrôler les forêts"
Le milliardaire fondateur du groupe Virgin, Richard Branson, consacre une partie de sa fortune à la protection des forêts et de leur faune.
Vous avez créé un sanctuaire pour les lémuriens dans une île des Caraïbes. Envisagez-vous d'aider d'autres espèces menacées par la déforestation ?
Les lémuriens sont une si belle espèce, nous devons le sauver. Ces derniers mois, j'ai aussi voyagé autour du monde pour sauver des requins ou des tigres. La déforestation entraîne des déplacements d'êtres humains, mais aussi d'espèces animales qui sont aussi importantes.
La déforestation est souvent causée par les populations locales. Quelle est la solution ?
On peut découvrir l'exploitation illégale avant qu'il ne soit trop tard. C'est pourquoi je viens de prendre une nouvelle initiative dans ma base spatiale. Nous allons lancer des satellites qui contrôleront les forêts pour voir où les coupes sont opérées.